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RAPPEL
Avant
tout, il est essentiel de rappeler que la société
occidentale du 18ème siècle est chrétienne.
Les mentalités sont forgées de croyances
anciennes, sur les femmes notamment. Au 18ème
siècle, même si la société
chrétienne européenne a quelque peu évolué
depuis le Moyen-Age, il est des mythes qui perdurent.
Ainsi en est-il du mythe de la femme créée
non en même temps que l'homme, mais à partir
de l'homme... Sur ce mythe repose l'essentiel du comportement
des hommes à l'égard des femmes : la femme
doit tout à l'homme, elle lui est soumise...
Sans oublier que la femme est le symbole du malheur
du genre humain : en effet, n'est-ce pas, Eve qui, dans
la mythologie judéo-chrétienne, incita
Adam à manger le fruit interdit ?
Femme faible de par sa constitution, femme tentatrice,
femme fatale, les femmes, depuis des temps très
anciens, sont cause de nombreux malheurs. A la veille
de la Révolution française, les mentalités
n'ont pas beaucoup changé...
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En 1789, lors des débats sur les conditions
de formation des assemblées primaires, la question
du droit de vote des femmes ne fut même pas soulevée
à l'Assemblée Constituante. Elles étaient
naturellement évincées des droits civiques,
sous le poids des préjugés sur la nature
des femmes et de la perception de la frontière
entre espace privé et public, l'ordre des rapports
naturels et sociaux.
Les lieux communs sur la nature des femmes sont
nombreux. Littérature, philosophie et médecine
ont croisé leurs approches afin de " naturaliser
" à l'extrême la féminité
: " constitution délicate ",
" tendresse excessive ", " raison
limitée ", " nerfs fragiles "
L'accent est mis sur l'infériorité intellectuelle
et physiologique de la femme. Diderot, dans son essai
de 1772 Sur les Femmes, note que l'exaltation
de la beauté féminine et la célébration
du sentiment amoureux ne sont que l'envers de l'enfermement
de la femme dans son infériorité physique.
Les femmes ne sont pas considérées
comme de vrais individus pour les hommes de 1789.
Elles doivent se contenter d'une activité domestique,
extérieure à la société
civile, et sont donc considérées comme
des mères ou ménagères, loin des
fonctions sociales que certaines désirent. Cette
identification de la femme à la communauté
familiale dépouille la femme de son individualité.
La femme est le principe spirituel (l'âme) du
foyer, l'homme en est le principe juridique. Le cantonnement
de la femme à la sphère privée
s'accentue lorsque l'homme est reconnu dorénavant,
avec la Révolution, comme un sujet autonome,
participant directement à la souveraineté
politique.
"
En vérité, je suis bien ennuyée
d'être une femme : il me fallait une autre
âme, ou un autre sexe, ou un autre siècle.
Je devais naître femme spartiate ou romaine,
ou du moins homme français. [...] Mon esprit
et mon coeur trouvent de toute part les entraves
de l'opinion, les fers des préjugés,
et toute ma force s'épuise à secouer
vainement mes chaînes. O liberté, idole
des âmes fortes, aliment des vertus, tu n'es
pour moi qu'un nom !"
Mémoires de Madame Roland - Jeanne-Marie
ou Manon Philippon (1754-1793). |
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